
Le Liban est un État multiconfessionaliste. Depuis l'accord de Taëf (la fin de la guerre civile) 64 sièges sont réservés au parlement pour les chrétiens, soit autant que pour les musulmans (contre 54 chrétiens pour 45 musulmans avant Taëf). La principale confession est l'Église maronite (34 sièges). De plus, le président est forcément chrétien maronite, et les vice-premier ministre et vice-président du parlement sont grecs orthodoxes. Le général en chef de l'armée est maronite. Le premier ministre doit être sunnite alors que le président de l'assemblée nationale doit être chiite.
Après les accords de Taëf, le pouvoir a été transféré au gouvernement dont le chef, toujours sunnite, exerce effectivement le pouvoir. De nos jours le point fort de la présence des maronites au Liban est leurs institutions éducatives (écoles et universités), hospitalières, et centres sociaux (enfance, vieillards, orphelinats), répandues dans tout le pays. Ces institutions sont aux mains de l'Église, et des ordres monastiques maronites très puissants et très organisés.
Quelles sont les élites politiques représentatives des maronites?
La grande famille des Gemayel, et le parti Kataëb, représentent les maronites au sein du mouvement du 14 mars. A leurs cotés on trouve les Forces Libanaises, et leur chef, Samir Geagea. Dans l'autre camp, le 8 mars, les Maronites sont représentés par le parti du général Aoun, et par Suleiman Frangié.
Comment est perçue l'alliance entre Michel Aoun et le Hezbollah?
Pour les partisans du général Aoun, cette alliance représente une garantie de survie pour les maronites et autres chrétiens du Liban, avec un parti de plus en plus puissant localement et sur le plan international. Pour les autres, l'alliance de Aoun avec le Hezbollah va à la longue réduire les maronites à un statut de "dhimmisation", dans la mesure où le vrai décideur est le Hezbollah. Le Hezbollah est par ailleurs perçu comme le principal vecteur d'un retour de l'influence syrienne au Liban. Le retournement de Michel Aoun qui avait gagné sa popularité en combattant cette influence syrienne, demeure pour beaucoup inexplicable.
Quels rapports entretiennent les maronites avec les autres communautés, et plus spécialement avec les chiites et les sunnites?
Ce rapport dépend du camp dans lequel se trouvent les maronites, 14 mars (sunnites) ou 8 mars (Hezbollah).
Samir Geagea a fait d'énormes efforts pour effacer son passé de seigneur de la Guerre, tout comme les Kataëb, en maintenant tout de même la ligne nationaliste libanaise qu'ils ont toujours défendue. Les sunnites ont beaucoup aidé à ce rapprochement aussi, surtout depuis leur engagement ferme auprès de l'armée libanaise contre les extrémistes (sunnites) de Nahr el-Bared. Saad Hariri a par ailleurs mené une politique très pro-chrétienne, et proclame constamment que la parité islamo-chrétienne sera toujours respectée au Liban, quelle que soit le nombre des chrétiens.
Les maronites du 8 mars sont persuadés que l'alliance maronito-sunnite scellée en 1943 est bien morte, et que les chiites ayant été persécutés comme les autres minorités en Orient, seront un partenaire bien plus conciliant avec les chrétiens que les sunnites. En général aujourd'hui au Liban, les maronites sont partagés à égalité entre les deux camps.
Les maronites sont-ils très croyants, soudés comme le peuvent être les chiites du Hezbollah par la religion?
Oui, ils sont très croyants et pratiquants. Ils n'ont cependant pas les mêmes réflexes de solidarité que les chiites du Hezbollah. Peut-être est-ce dû à leur culture chrétienne, qui les ouvre à celle de l'Occident et à des valeurs individualistes et indépendantes, alors que la culture chiite est attirée par l'Iran.